Le directeur général de la PME nordiste promeut une stratégie fondée sur l’innovation en matière de valorisation de déchets. Interview.
Baudelet Environnement est une entreprise spécialisée dans le traitement et la valorisation des déchets. Sur ce marché très concurrentiel, en quoi vous différenciez-vous ?
Bernard Poissonnier : D’abord, nous revendiquons notre statut d’entreprise indépendante et familiale. 100 % du capital est détenu par la famille Baudelet-Poissonnier.
Mon beau-père est le PDG du groupe, moi, son directeur général et ma femme Catherine, la directrice administrative.
Depuis 2008, nous travaillons avec nos enfants Jean-Baptiste et Caroline, qui représentent la quatrième génération. J’ai nommé un directeur général adjoint, Olivier Ramackers, pour ses compétences, mais il est aussi chargé d’assurer la transition entre les deux dernières générations. Même s’il me reste beaucoup de choses à faire, j’approche les 60 ans et il faut préparer l’avenir.
Votre dimension de PME familiale, comment en tirez-vous parti ?
B. P. : Baudelet Environnement s’appuie sur trois pôles d’activité : les déchets non dangereux, les ferrailles et métaux et un pôle matériaux dédié au traitement des terres et sédiments pollués.
Le cœur du système, c’est notre Eco-Parc de Blaringhem autour duquel gravitent six centres de tri de proximité, tous implantés dans le Nord-Pas-de-Calais. Nous comptons environ 250 salariés en CDI. On peut donc nous considérer comme une ETI, entreprise de taille intermédiaire.
Cette organisation à taille humaine favorise les prises de décision rapides, la fluidité des relations internes et l’implication des dirigeants dans la gestion quotidienne. Nous sommes sans doute plus réactifs qu’un grand groupe pour faire émerger des projets innovants. Au moins une fois par mois, chaque membre du top management a la possibilité de soumettre un projet qui lui tient à cœur. S’il correspond à notre stratégie et à nos valeurs, il peut être mis en œuvre rapidement. L’intrapreneuriat, chez nous, ça marche.
Si l’innovation est au cœur de votre stratégie, sur quels axes porte-elle ?
B. P. : Notre slogan, c’est « déchets égale source d’énergie ». On parle aujourd’hui beaucoup d’économie circulaire, un modèle écologiquement vertueux. Nous, on la pratique depuis 20 ans.
Plus récemment, nous avons investi 15 millions d’euros dans une unité de méthanisation à partir de déchets organiques et une unité de production de combustibles solides de récupération. Opérationnelles depuis fin 2013, ces installations permettent de transformer des déchets organiques en biogaz, lequel alimente trois moteurs capables de générer chacun 1 megawatt d’électricité. De l’énergie que l’on revend ensuite à EDF. Cet investissement, très important pour nous, devrait être amorti sur dix ans.
Nous avons aussi développé d’autres projets de valorisation innovants. Les jus de déchets sont, par exemple, transformés en lave-glace écologique. La pérennité de l’entreprise passe par l’innovation. C’est la seule manière de résister à la concurrence de groupes plus puissants.
Contrairement à eux, nous sommes propriétaires de nos sites, pas de simples exploitants. Cela permet d’adapter nos outils de traitement et créer de nouvelles activités pour garder une longueur d’avance dans la valorisation de déchets. Dans ce domaine, nous avons encore beaucoup de choses à créer. Notre seule limite, c’est la rentabilité économique des projets à mettre en place.
Justement, sur quels projets de développement travaillez-vous actuellement ?
B.P. : Nous envisageons la création de nouveaux centres de tri dans le sud des départements du Nord et du Pas-de-Calais. De ces sites partent les déchets qui doivent être traités à Blaringhem. Avec un territoire mieux quadrillé, nous pourrions améliorer notre bilan carbone en limitant les trajets en camion. L’idéal serait de ne faire voyager que des camions en pleine charge.
Par ailleurs, nous préparons l’application d’une nouvelle réglementation européenne qui oblige dès le 1er janvier 2015 à valoriser 95 % des véhicules hors d’usage dont 85 % en réutilisation ou en recyclage. Logiquement, nous devrions donc valoriser davantage de métaux et ferrailles, mais aussi des plastiques et caoutchouc provenant des épaves. Il faudra s’y adapter.
De quoi mettre à l’épreuve notre bonne capacité de réaction.